L'équipement analogique 128 lignes fut opérationnel durant une dizaine d'années, mais l'arrivée des
premiers microprocesseurs en 1974 est très prometteuse. En effet, malgré le charme de la SSTV sur tube
rémanent, on voit bien que des progrès sont possibles, notamment :
- afficher l'image de réception ou de contrôle à l'émission sur un téléviseur ou un moniteur de
vidéosurveillance noir et blanc 625 lignes en ambiance lumineuse normale.
- saisir instantanément une image, avec stockage en mémoire, et relecture au standard SSTV noir et blanc
à 128 lignes.
- grâce à cet instantané, résoudre le problème du "bouger" à la prise de vue : avec la camera analogique, il
ne fallait pas bouger, au risque d'afficher la tête de l'opérateur séparée du corps avec une forte distorsion !
- envisager le passage à la couleur : des essais ont été réalisés par plusieurs radioamateurs, en analysant des
diapositives couleurs trois fois de suite en interposant un filtre vert, jaune puis rouge....à la main, devant un
appareil photo classique ou Polaroïd. La photo est ensuite développée sur papier, on ne peut donc pas parler vraiment de TELEVISION.
L'avenir de cette solution est condamné d'avance.
Un stage sur microprocesseur MOTOROLA MC6800 en 1978 me donne bien quelques idées, mais la mise en oeuvre des circuits
imprimés est assez complexe. Puis, un ami radioamateur informaticien me remet des circuits comportant
un grand nombre de registres à décalage de 1024 bits. La solution avec registres est assez "rustique",
mais relativement simple au niveau de l'adressage. Par contre, je compte gérer la partie commutation et synchro
par microprocesseur MC6800, qui a pour avantage un double accumulateur. Cliquer sur la fiche produit du registre MM1404A :
A cette époque, il n'y a pas encore de PC,
et le matériel de développement n'est pas à la portée d'un radioamateur. Certains amateurs (et même professionnels) courageux
ont monté des plaquettes de programmation manuelle, avec autant des groupes de 8 switches (un groupe par octet) ! Ils programment
octet par octet des milliers d'instructions ! L'un de mes collègues est devenu un champion dans ce type d'exercice
mais son outil de développement a été conçu pour les nouveaux microprocesseur RCA, je ne peux donc
pas m'en inspirer.
J'entreprends cependant la réalisation de la partie mémoires, soit trois plaquettes de circuit imprimé devant
recevoir 16 registres à décalage de 1024 bits. Le principe consiste à stocker une trame de 128 x 128 = 16384 bits
en mémoire. Pour des raisons économiques et de simplification, 3 groupes de mémoires de 16384 bits doivent suffire
pour obtenir 8 niveaux de gris (2 groupes=4 niveaux, 3 groupes=8 niveaux), ce qui est tolérable pour l'oeil.
Il faut donc au total 3 groupes de 16 registres de 1024 bits, ce qui est réalisable avec de la patience par
un radioamateur.
Un convertisseur A/D (analogique numérique) de chez Analog Device en entrée reçoit le signal SSTV analogique après
démodulation, puis en sortie un convertisseur D/A reconstitue après mélange des signaux de synchro le signal SSTV
vers l'émetteur BLU.
En 1982 nous passons nos vacances en famille chez des amis de la région de Kiel, au nord de l'Allemagne sur la mer Baltique. J'en profite pour
rendre visite au DARC (Deutsche Amateure Radio Club) et à l'entreprise WRAASE (DL2RZ), qui fabrique des matériels
SSTV professionnels.
J'y apprends qu'un radioamateur de la banlieue de Kiel, a conçu un système analogue à celui
que je suis entrain de réaliser.
Il nous reçoit comme les amateurs nordiques savent le faire et dans les minutes suivant les présentations, je vois
s'afficher instantanément le visage de mon YL sur l'un de ses nombreux moniteurs 625 lignes. La qualité est
saisissante, malgré les 128 lignes et les 8 niveaux de gris que l'on discerne très légèrement.
Il lui a suffi d'appuyer sur un bouton poussoir pour saisir l'image en instantané, ce qu'il peut renouveler
autant de fois qu'il le souhaite jusqu'à obtention d'une image de qualité.
Il me propose d'acheter le dossier d'études qu'il commercialise, ce que je trouve tout à fait normal compte tenu
du travail considérable qu'une telle réalisation représente. Le synoptique de son montage est très
voisin du mien, mais il utilise des circuits logiques conventionnels pour la partie commutaion-bases de temps et
synchro.
Pour cette partie, je prévoyais d'emprunter le micro-ordinateur MATRA ALICE de ma fille de 8 ans, pour générer
la synchro et l’affichage des messages de caractères, avec programmation en langage assembleur sur microprocesseur
MC6803. Le programme était enregistré sur magnétophone à cassette, mais MATRA avait prévu de lancer sur le marché des lecteurs sur minidisques et des blocs d'extension mémoire enfichables
sur le connecteur du bus parallèle, à l'arrière du boîtier. Ce petit ordinateur était destiné à l'Education
Nationale, mais ne fut pas retenu, au profit du THOMSON TO5.
L'étude et la réalisation des circuits nécessita près de trois ans, mais le conflit avec ma QRPpète n'aura pas lieu,
puisque les ordinateurs personnels arrivèrent sur le marché. Je réalisai alors que mon montage serait dépassé en
très peu de temps, pour un investissement intellectuel et financier important. La mort dans l'âme je me séparai
de mes plaquettes à registres à décalage et il se passa quelques années pour que je
puisse acheter un premier PC Kenitec 486sx25, à destination familiale bien entendu...